Le Hasard et la Nécessité

 " Tout ce qui existe dans l'univers est le fruit du hasard et de la nécessité " - Démocrite.

Qu'est-ce que le Hasard ?

Par définition, le Hasard, ce serait (selon le Wiktionnaire) une "cause imprévisible". Ainsi, est régi par le Hasard tout événement dont on ne peut prévoir l'issue.

J'aimerais maintenant faire la distinction entre deux sortes de Hasards et y introduire les notions de subjectivité et de lois.

Je pense qu'il y a en effet deux sortes de Hasards :

-Le Hasard strict : C'est le "vrai" Hasard. L'événement ne peut être prédit car c'est fondamentalement impossible. Aucune loi ne permet d'expliquer pourquoi l'événement s'est produite de telle façon et pas d'une autre. Nous sommes donc dans l'incapacité complète de savoir quelle cause a déterminé l'événement à se produire comme il s'est produit, puisqu'en réalité, il n'y a pas de telle cause. C'est simplement ainsi.

Un exemple dans la physique quantique :

Cette image représente les positions ponctuelles probables d'un électron autour d'un noyau (représenté au centre de l'image, en rouge), qui est certainement un atome d'Hydrogène. Ainsi, s'il était possible de "geler le temps" à un instant t et d'observer la position de l'électron autour du noyau, on le trouverait forcément à la place de l'un de ses points noirs. Et nulle part ailleurs. C'est impossible, en raison de plusieurs lois diverses et complexes que je ne comprends moi-même pas toutes (voire pas du tout), mais cela n'est pas important. Ces lois déterminent l'électron à être positionné seulement à certains points de l'espace bien précis. Mais ces lois ne disent rien de plus. Ainsi, tout en suivant ces lois, l'électron peut être à plusieurs endroits différents, et il est impossible de savoir par avance où il est exactement. Nous sommes donc en présence d'un Hasard strict : l'électron est déterminé par la Nécessité (En philosophie, la Nécessité est l'équivalent des lois naturelles. Est nécessaire ce qui ne peut pas ne pas être. Ou, ce qui "doit" "forcément" être, moins rigoureusement. Donc, ce sont bien les lois naturelles, les lois physiques) à être à l'une de ces positions, mais sa position exacte, elle, n'est aucunement déterminée. En l'absence de loi, il est impossible de prévoir, et on a bien un Hasard strict.

Par contre, on peut dire une chose du Hasard strict : Il finit par disparaître presque totalement avec les grands nombres. Voici un exemple, plus clair qu'une explication :

Lorsque l'on fait passer des électrons tour à tour à travers des fentes d'Young, c'est-à-dire deux fentes parallèles dans un écran opaque (notez que ceci est un pléonasme, un écran est toujours opaque, mais je tenais à insister), il se comporte comme une onde (ne me demandez pas pourquoi, et d'ailleurs, ce n'est pas important pour ce que je vais montrer) : c'est la dualité onde-corpuscule. L'électron, corpuscule (ou particule, c'est la même chose), se comporte comme une onde. Pourtant, une fois qu'il se sera écrasé sur l'écran du fond, derrière les fentes d'Young, où on aura pu noter sa position, il sera redevenu une particule. Voici un schéma explicatif :

Ainsi, on lance une particule, elle se comporte ensuite comme une onde, avant de redevenir une particule unique, une fois qu'elle a percuté l'écran du fond. Lorsqu'on en lance un seul, impossible de prévoir où il va arriver. Idem pour 50, 100, 200. À partir de nombres très élevés, comme vous pouvez le constater vous-mêmes avec le nombre d'impacts sur les images ci-dessous (vous pouvez vous amuser à compter !), on finit par retrouver un schéma précis, celui des interférences. Ainsi, si le comportement individuel est imprévisible, on peut néanmoins dire que la probabilité qu'il arrive à un endroit précis de l'écran est d'autant plus grande que la frange d'interférence (dans le cas d'une onde) serait lumineuse.

 

Et finalement, au niveau de la lumière de tous les jours, ce sont des milliards et des milliards (en fait, un nombre vraiment astronomique) de photons qui constituent la lumière. Chaque photon suit sa loi imprévisible, mais on voit une frange d'interférence nette :

Conclusion : Avec les grands nombres, le Hasard quantique semble disparaître totalement au profit de probabilités connues et prévisibles (un pourcentage de particules est associé à la tâche centrale, un autre aux deux tâches directement autour de la tâche centrale, un troisième pour les suivantes, etc.) que l'on retrouve toujours au bout d'un certain nombre de répétitions.

-Le Hasard subjectif, c'est à dire relatif à l'être humain, dépendant de lui. C'est le Hasard "courant", ou "faux" Hasard. Je m'explique. Nous nommons Hasard une cause imprévisible. Or, un élément peut être imprévisible pour seulement deux raisons : soit c'est strictement impossible (cas du Hasard strict), soit nous, en tant qu'humains, ne le pouvons pas (Hasard subjectif).

Exemple : Vous êtes à la fête foraine, et vous faites tourner une "roue de la fortune" (notons que "fortune" signifie bien "hasard", ici...). Le résultat sera dit hasardeux car la cause qui déterminera la roue à s'arrêter sur la zone "Gagné" plutôt que sur une autre est imprévisible. Or, je peux vous dire qu'en fait, cette cause est prévisible : en effet, si l'on connaît la force appliquée à la rotation de la roue, et l'énergie qu'elle perd en frottements avec son support et avec l'air (et en admettant que les événements quantiques sont négligeables au niveau macroscopique, ce qui est le cas), il est possible de dire quel est le résultat de la roue. Ici, le Hasard vient donc bien de notre ignorance et non pas d'une impossibilité physique.

J'ai donc montré que le Hasard pouvait être séparé en deux concepts distincts, celui qui dépend de nous, et celui qui n'en dépend pas. Ainsi, le Hasard que nous rencontrons tous les jours, le Hasard commun, est subjectif, car il découle en fait de lois que nous connaissons. C'est pourquoi la plupart des événements que nous nommons Hasard n'en sont pas vraiment (car en effet, lorsque l'on parle de Hasard, on a tendance à penser à un Hasard strict). Ils découlent simplement d'un enchaînement nécessaire d'événements, c'est-à-dire, régi par des lois physiques.

Par ailleurs, je reviens maintenant au Hasard strict, que nous avons limité aux phénomènes quantiques, et strictement au phénomènes quantiques. En effet, Einstein disait lui-même "Dieu ne joue pas aux dés". La physique quantique étant le seul domaine pour lequel il ait pu dire ça, on peut en conclure que tout le reste est explicable sans le Hasard strict. (Pour la suite, on peut considérer Dieu comme étant un être doué de volonté et de raison qui a la capacité d'influencer les événements qui se produisent.)

Mais on a constaté qu'effectivement, "Dieu joue aux dés". Alors, à ceux qui me soutiennent que non, "il n'y a pas de Hasard, c'est Dieu qui régit tous les événements", je leur répondrai :

-Effectivement, dans la vie de tous les jours, il n'existe aucun Hasard strict, le Hasard provient entièrement de notre ignorance et Dieu n'a rien à voir là-dedans.

-Le seul domaine où le Hasard existe, c'est le domaine quantique. Notons que pour nous, humains, les effets du Hasard strict tendent à s'effacer entièrement avec le grand nombre de répétitions : nous sommes constitués d'un nombre d'atomes extrêmement élevé, largement suffisant pour faire disparaître les effets quantiques. Voudrez-vous bien m'expliquer, alors, pourquoi Dieu s'amuse à changer de manière totalement aléatoire la position des électrons autour de leur noyau, ou des photons sur un écran dans l'expérience des fentes d'Young, sachant qu'au niveau macroscopique, ce genre de changements est vraiment minime, voire inexistant ?